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Les filatures

Audincourt | Doubs | 1814
Époque contemporaine | L'âge industriel

Les filatures
© Jean-Mathieu Domon

De l'eau pour du coton

La filature d’Audincourt, en activité de 1814 à 1965, marque le passage de la fabrication artisanale en atelier à la production de masse en usine. Elle symbolise la naissance de l’industrie moderne au XIXe siècle en Europe. Elle produit du fil de coton, une fibre importée d’Amérique, plus solide que les fibres traditionnelles locales, chanvre et lin et qui révolutionne la mode vestimentaire de l’époque. Elle est installée sur les bords du Doubs et utilise la force de l’eau, source d’énergie naturelle et abondante dans la région. Elle emploie des métiers mécaniques ne nécessitant aucun savoir-faire particulier pour peigner et bobiner. La main-d’œuvre est donc majoritairement composée d’enfants et de femmes moins payés que les hommes. La filature arbore les deux symboles les plus marquants de l’architecture industrielle du XIXe siècle : un toit dit à shed avec deux pans dont l’un est vitré pour éclairer les ateliers, et une haute cheminée de briques rouges, car pour suppléer l’énergie hydraulique, une machine à vapeur alimentée au charbon est installée à la fin du siècle.

En savoir plus

Une facette industrielle méconnue

Avant que l’industrie automobile ne devienne dominante dans le pays de Montbéliard diverses activités industrielles étaient déjà bien implantées au XIXe siècle : sidérurgie, métallurgie, horlogerie, brasserie, textile… Ainsi filature et tissage, fers de lance de la révolution industrielle, ont fortement imprégné le paysage et la vie sociale d’Audincourt autour de l’usine Japy. Elle est un témoin privilégié des mutations techniques du XIXe siècle et de la spécificité du milieu local. Si la fabrique adopte les techniques de production anglaises avec l’emploi de machines à filer, les fameuses mule jenny, les sources d’énergie diffèrent ; l’eau remplace le charbon : la force motrice est fournie par le Doubs. Cependant la puissance limitée des installations hydrauliques conduit à installer en 1852 une machine à vapeur alimentée au charbon, identifiable sur les vues du XIXe siècle par cette haute cheminée de briques symbole de l’architecture industrielle de l’époque.
Les frères Peugeot comprennent le potentiel offert par le coton d’Amérique qui supplante désormais les fibres traditionnelles, chanvre et lin. Dès 1814, ils fondent l’usine pour produire des filés de coton destinés aux fabricants mulhousiens d’indiennes (pièce de coton imprimée). L’établissement change plusieurs fois de mains : Japy et Sahler en 1832, Scheurer en 1852 à qui l’on doit la construction de la filature actuelle à trois étages, Léon Salher en 1882 et enfin Japy à partir de 1914. Ces propriétaires sont toujours à la pointe de l’innovation pour résister aux aléas de la conjoncture : extension des locaux, installation de turbines hydrauliques, couplées à une machine à vapeur, automatisation plus poussée. En 1903, l’usine dispose de 21 000 broches de filature, de 500 métiers mécaniques et emploie 600 personnes, surtout des femmes. L’apparition des fibres synthétiques, la concurrence de pays manufacturiers à bas salaire provoquent néanmoins la fermeture de l’usine en 1965.

Contexte

Au XVIIIe siècle en Angleterre, la population augmente. Les besoins en produits fabriqués s'accroissent. Pour répondre à la demande grandissante de cotonnades indiennes, des artisans anglais perfectionnent les machines à filer et les métiers à tisser. La production textile est mécanisée. Les progrès sont extraordinaires : en 1800, un ouvrier dans un atelier de filature file autant avec la nouvelle mule-jenny que 400 personnes avec les anciens rouets ! Dans les années 1760, l'ingénieur écossais James Watt améliore la machine à vapeur. Elle devient un puissant moteur, d'une force bien supérieure à l'homme ou l'animal pour actionner les machines. L'industrie l'adopte rapidement. À partir de 1785, les mules-jennies sont actionnées par la force-vapeur. Une série d'inventions multiplie les nouvelles machines. Les besoins en matériaux et en énergie entraînent l'essor de la sidérurgie et des industries minières. Le textile poursuit son bond en avant. Les usines s'installent dans les régions où les minerais sont extraits, en Angleterre, en France et en Allemagne. Naît ainsi la grande industrie. Elle concentre dans les usines une main-d'œuvre ouvrière qui travaille au rythme des machines. C'est l'ère du machinisme. Certaines usines regroupent des milliers d'ouvriers comme les forges des Schneider au Creusot. Les paysages du Nord-Est de la France, du Massif central ou de la Ruhr en Allemagne se transforment. Ces régions industrielles voient se multiplier les hauts-fourneaux de la sidérurgie, les terrils et chevalement des mines, les grandes cheminées des usines. Ces bouleversements sont désignés par l'expression « révolution industrielle ». Désormais, des historiens préfèrent parler d'industrialisation. Ils insistent sur la lenteur des progrès. Jusqu'en 1850, l'essentiel de la force motrice est toujours fourni par chevaux et moulins ! L'organisation traditionnelle du travail et l'artisanat cohabitent avec les formes modernes de l'industrie durant tout le XIXe siècle.

Complément(s)

Autre(s) ressource(s)

 

Document(s)

Une visite aux forges d’Audincourt

En 1833, Georges Dufaud, maître de forge dans le Nivernais, soucieux de progrès technique, fit un voyage en Franche-Comté pour étudier la fabrication du fer. Il décrit dans un texte très précis deux des établissements qu’il visite.

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