Une sucrerie entre chemin de fer et canal
En 1872, Émile Thiriar, qui habitait Calloo (aujourd’hui Beveren, en Flandre occidentale), a acheté un terrain dans l’Yonne, à Brienon, pour y faire édifier une usine produisant du sucre brut à partir de betteraves. Cette industrie de transformation de la betterave a démarré sous Napoléon Ier mais a connu son essor dans le dernier tiers du XIXe siècle.
La sucrerie a été fondée dans une région dans laquelle la culture de la betterave pouvait se développer et dans un département dans lequel il n’y en avait pas ; celles de Seine-et-Marne étaient situées nettement plus au nord. En outre, le terrain acheté bénéficiait d’une situation favorable au développement industriel, à proximité d’une petite ville pour la main-d’œuvre ouvrière mais un peu à l’écart pour éviter les nuisances, entre le canal de Bourgogne et la voie ferrée du PLM, ce qui permettait l’acheminement des matières premières (betteraves, charbon pour la machine à vapeur et les chaudières, chaux) et l’expédition du sucre produit.
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Le plan sur calque a été réalisé en 1889 à l’occasion de réclamations portées par la commune de Brienon (environ 2700 habitants à l’époque) à cause de la pollution de nappes phréatiques, et donc de l’eau des puits, par l’infiltration d’eaux contaminées par l’activité industrielle. Des travaux sont alors imposés par le préfet à l’industriel afin d’éviter ces infiltrations et la pollution qu’elles engendrent.
L’arrêté du préfet souligne le fait que la pollution émanant de l’activité de la sucrerie n’était pas prévisible en 1872. En effet, les industries ne pouvaient pas être installées n’importe où et il y avait déjà des normes liées aux activités « insalubres, dangereuses ou incommodes » comme le montre le dossier lié à la construction de cette sucrerie dont l’activité a débuté en 1873. Émile Thiriar a déposé une demande auprès du préfet, ce qui a enclenché tout un processus de contrôle qui dure plusieurs mois. Les ingénieurs du département sont amenés à se prononcer, une enquête est menée dans la commune – les habitants pouvant indiquer les avantages et/ou inconvénients qu’ils voient à cette installation – et le maire et le sous-préfet ont rendu un avis positif avant que le préfet prenne un arrêté autorisant la construction de l’usine.
Suite à la pollution notée en 1889, le propriétaire de l’usine a 6 mois pour mettre en place les mesures préconisées. S’il ne le fait pas dans les délais impartis, il risque le retrait de son autorisation d’exploitation de l’usine.
Nathalie Verpeaux, professeure d’histoire-géographie.
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