Une carte d’électeur
Un objet indispensable
Objet symbole du droit de vote, la carte d’électeur est également liée au processus de création des papiers d’identité. Elle n’a été rendue obligatoire qu’en 1884 mais, dès les premières élections révolutionnaires, beaucoup de communes l’instaurent pour identifier les votants. L’objectif de la carte est surtout de convoquer, en un lieu et à une date déterminée, l’électeur à l’assemblée des votants (ici l’arrondissement de Besançon pour des élections législatives en 1846). Cette convocation est adressée dans un premier temps par le préfet puis, plus tard, par le maire. Si elle diffère selon les communes par sa couleur ou sa forme, la carte mentionne systématiquement le nom, le prénom, le domicile, la signature du titulaire ainsi qu’un numéro d’ordre qu’on re sur la liste électorale. On y lit parfois aussi sa date de naissance et, alors que le suffrage est encore censitaire, sa qualification ou sa profession.
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Voter : un privilège
Sous la monarchie libérale de Louis-Philippe, de 1830 à 1848, trois types de scrutins peuvent se dérouler: des élections municipales, cantonales ou législatives. C’est ces dernières qu’évoque la carte d’électeur du bisontin Joseph Bernard, propriétaire d’un relais de poste à chevaux. Le document reflète surtout le principal débat politique de ces années : la question de l’élargissement du corps électoral. Bernard compte parmi les quelques 1400 Doubistes privilégiés qui ont le droit de voter (soit environ un électeur pour 200 habitants). Le débat récurrent sur l’expansion des droits civiques et l’abaissement du cens électoral, fil conducteur de la monarchie de juillet, deviendra la cause de la chute de Louis-Philippe. Les conservateurs, arc-boutés sur leur privilège, estiment que le cens électoral est une garantie de stabilité contre le désordre social alors que les réformistes voient dans l’élargissement du corps des votants un moyen de renforcer la légitimité du régime. Les élections législatives d’août et septembre 1846 ont vu la large victoire des conservateurs, contribuant, en apparence, à renforcer la position du gouvernement Guizot. Les quelques 246 000 électeurs français ont certes montré leur adhésion au conservatisme, mais, paradoxalement, cette situation, qui dispense le gouvernement d’accommodement à l’assemblée, contribue à plonger le régime dans la crise. Dans un contexte de difficultés économiques croissantes, l’opposition s’est dès lors affirmée en dehors des institutions, en organisant des banquets, points de départ de la future révolution de février 1848.
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