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Un épisode du siège de Belfort

Belfort | Territoire de Belfort | Archives départementales du Territoire de Belfort | 1871
Époque contemporaine | La guerre aux XIX et XX ème siècle

© Archives départementales de Belfort, 1J58/30

Cet ordre, de la main de Denfert-Rochereau, gouverneur de la place de Belfort, est daté du 20 janvier 1871. Il ordonne le transport des projectiles stockés dans les enceintes extérieures et intermédiaires dans un magasin à proximité du château, à l’abri des tirs ennemis. En effet, le village de Perouse, proche du flanc est de la forteresse, vient de tomber sous le feu des bombes incendiaires des Prussiens ; ceux-ci cherchaient à se rapprocher le plus possible de la citadelle qui restait jusqu’alors inaccessible à leurs canons de courte portée ; s’emparer de cette position stratégique devait leur permettre d’atteindre plus aisément leur objectif. L’étau autour de la ville de Belfort se resserre.

Depuis le 4 novembre 1870, la ville est assiégée par 60 000 hommes des troupes ennemies ; la ville est bombardée à partir du 23 novembre, de façon toujours plus intensive. Les espoirs des belfortains résidaient dans la rumeur de l’arrivée prochaine d’une armée de secours, en provenance de Saône-et-Loire, dirigée par le général Bourbaki.

En savoir plus

La guerre qui oppose l’Empire français à une coalition d’Etats allemands, à la tête de laquelle se place la Prusse, débute le 19 juillet 1870. Ce n’est que fin octobre que les troupes ennemies commandées par le général Von Treskow reçoivent l’ordre d’investir Belfort. Le premier affrontement se déroule à Rougemont, le 2 novembre, opposant les Prussiens à des volontaires et des Mobiles peu aguerris. D’autres combats se déroulent dans le même secteur, marqués par une défaite systématique des Français qui ne disposent pas d’artillerie et de cavalerie et se trouvent dans l’incapacité de ralentir l’avancée ennemie. La ville de Belfort est entièrement assiégée à partir du 4 novembre. C’est avec 17 000 hommes et 350 canons que le colonel Denfert-Rochereau, commandant de la place de Belfort, défend avec acharnement la forteresse ; les Prussiens perdent tant d’hommes lors de l’attaque sur les Perches qu’ils vont surnommer Belfort « Todten fabrik » (l’usine à morts). Le 28 janvier 1871, alors que des rumeurs annoncent la signature d’un armistice par le gouvernement provisoire réfugié à Bordeaux, les combats redoublent d’intensité. Des bombes incendiaires frappent plusieurs quartiers de la ville. Ce n’est que le 17 février, au lendemain de l’annonce de la reddition, que les premières troupes, sur ordre de Denfert-Rochereau, quittent la ville. Celle-ci se retrouve immédiatement investie par 5 000 prussiens, qui l’occuperont deux années durant.

Le bilan humain est lourd : 1200 combattants français auraient trouvé la mort ; le chiffre de 25 000 tués et blessés est retenu du côté prussien. 40 à 50 civils ont trouvé la mort au cours des bombardements, ajouté à cela quelques 200 personnes n’ayant pas survécu aux privations et maladies. Les dégâts matériels sont évalués à 5 millions de francs : peu de maisons ont été épargnées, l’église St Christophe est également très endommagée.

La signature du traité de Francfort le 10 mai 1871 permet à Belfort et à 105 communes proches de demeurer françaises ; un administrateur provisoire pour la zone française détachée du Haut-Rhin est nommé, dans l’attente de la réintégration à l’Alsace. Cette situation perdurera jusqu’en 1922, année de l’accession de l’administrateur au rang de préfet et de la création du département du Territoire de Belfort. Le recensement de 1872 fait état d’une baisse de la population ; quatre ans plus tard, le département compte 12 000 habitants supplémentaires, issus principalement de l’émigration d’Alsaciens fuyant l’annexion et se déclarant optants à la nationalité française.

Sandrine Bozzoli, professeure d’histoire-géographie.

Contexte

Gouverner sous le Second Empire

Le peuple ratifie lors d'un plébiscite l'instauration du Second Empire. Selon Napoléon III, qui se présente héritier et défenseur, comme Napoléon Ier, des principes de 1789, la souveraineté de la Nation doit s'incarner dans un chef, l'Empereur. Il peut faire directement appel au peuple par plébiscite. Le régime qui se met en place est autoritaire. Le pouvoir exécutif incarné par l'Empereur domine. Les fonctionnaires doivent prêter serment à Napoléon III et les ministres ne sont responsables que devant lui. Napoléon III a seul l'initiative des lois et décide de la guerre ou de la paix. Le pouvoir législatif se partage entre le Corps législatif, élu au suffrage universel masculin, et le Conseil d'État et le Sénat dont les membres sont nommés par l'Empereur. La presse est contrôlée. Lors des élections, l'opposition peine à se faire entendre alors que les candidats officiels, soutenus par le régime, bénéficient de l'appui de l'Église et des facilités de réunion et d'affichage.

Les maires sont nommés par le préfet, fidèle à l'Empereur, pour toutes les communes, y compris celles de moins de 3 000 habitants, pour cinq ans à partir de 1855.

Le Second Empire est un césarisme démocratique, c'est-à-dire une dictature qui affirme s'appuyer sur le peuple selon le principe de la souveraineté de la Nation.

À partir de 1860, l'Empire devient moins autoritaire et engage des réformes libérales. Il accorde le droit de grève aux ouvriers en 1864. Il donne davantage de droit à l'opposition et de pouvoir au Corps législatif. L'opposition républicaine progresse mais l'Empereur garde le soutien d'une large majorité de la population lors du dernier plébiscite sur les réformes libérales organisé en 1870. Cependant, Napoléon III commet l'erreur de se lancer dans l'aventure de la guerre contre la Prusse durant l'été 1870. La défaite française précipite la fin du Second Empire. La République est proclamée le 4 septembre 1870.

Complément(s)

Image(s)

 

Carte de l’encerclement de Belfort, établie à posteriori

 

Carte de l’encerclement de Belfort, établie à posteriori, ADTB A 67

Cette carte topographique au 1/20 000 est tirée de l’ouvrage de E. Thiers et S. de la Laurencie, intitulé « la défense de Belfort », publié en 1874. Outre les éléments naturels (rivières, marais, bois…) pouvant s’avérer stratégique lors d’un siège, elle répertorie les positions des deux camps : en rouge, apparaissent les fortifications françaises et en bleu, les travaux d’approche des assiégeants (tranchées et batteries prussiennes).

La une du Siège de Belfort du 10 novembre 1870 ADTB, pr 150 / C1473

Le Journal du Siège de Belfort publie son premier numéro le 10 novembre 1870. Comme son nom l’indique, il a pour vocation de relater les événements belfortains de la guerre franco-prussienne et « il vivra ce que dureront les hostilités ». Il est composé d’un ou deux feuillets imprimés recto-verso et parait les mardis, jeudis et samedis ; son rédacteur en chef, M. Favret, a installé un bureau à l’hôtel du Tonneau d’Or. Le journal est réédité à Lyon en mai 1871, sous forme reliée avec l’ajout de numéros présentant l’état des troupes, le nombre de victimes ou encore le bilan des destructions.

 

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