Le monument aux Résistants de Villy-en-Auxois
Une croix de Lorraine au coeur de l'Auxois
Chaque village de France possède son monument aux morts, inauguré au lendemain de la Première guerre mondiale, et Villy-en-Auxois ne fait pas exception. Souvent, sont ajoutés sur le monument communal les morts pour la France des conflits suivants. Dans cette petite commune d’à peine plus de 220 habitants, un autre monument a été érigé, au lendemain de la Deuxième guerre mondiale. Devant la mairie (quand celui des morts de la première guerre est plus proche de l’église), cet imposant bloc de marbre gris foncé occupe le centre de la place du village où se déroule, chaque premier dimanche du mois de mars, une cérémonie dédiée aux « glorieux morts de la guerre 1939 – 1945 », Résistants de la première à la dernière heure.
Sur les onze personnes dont le nom figure sur le monument, quatre ont été condamnés à mort le 29 février 1944 dans la salle des États de la mairie de Dijon pour « terrorisme et activité de franc-tireur » et fusillés le lendemain au stand de tir de Montmuzard à Dijon. Michel Ménestrier, Charles Guillier, Joseph Ménestrier et René Ménestrier. Tous quatre étaient membre du maquis Schellnenberger, le Normalien fusillé à Dijon en 1942, dont le nom figure également sur le monument. Marcel Lucotte, qui avait réchappé de la vague d’arrestations de février, fut assassiné à Lantilly au mois de mai. Auguste Boccard et Henri Ménétrier n’ont pas été fusillés, mais sont morts en déportation suite à la même affaire qui jeta sur l’Auxois en cet hiver 1944 une ombre terrifiante.
En savoir plus
L’Affaire Werner
A la fin du mois de janvier 1944, un accrochage tourne mal route des Laumes : un Résistant est fait prisonnier. Afin de tenter un échange, une opération est organisée à Pont-de-Pany où un officier supérieur de la police allemande appartenant à l’Ordnungspolizei (Orpo), la police d’ordre de Dijon, le major Werner, est blessé et capturé.
Transporté de cache en cache, le précieux blessé s’avère rapidement ne pas pouvoir faire l’objet d’un échange de prisonniers. Maîtrisant parfaitement le français, il est en outre un témoin dangereux pour les Résistants de la vallée de l’Ozerain desquels il pourrait dénoncer les lieux et les camarades impliqués. La décision est prise de l’exécuter.
Il s’ensuit une vague d’arrestations (plus de 119), avec le concours actif de la Milice locale, et, à la suite du fameux procès du 29 février salle des Etats à Dijon 15 « patriotes de l’Auxois » seront fusillés. De même, 28 personnes seront déportées dans le cadre de cette affaire. A ce jour (2024), seul Pierre Jobard, Résistant-déporté de 97 ans est encore à même de raconter cette sombre histoire, dont il a eu à subir les représailles. Aux premiers jours de mars, il ne manque jamais la cérémonie de Villy-en-Auxois.
Daniel Janichon, professeur d’histoire-géographie, référent culture PAH Auxois-Morvan.
Contexte
Combattre et résister au temps de la Seconde Guerre mondiale
Les résistants de l'intérieur contre l’occupant nazi s'organisent en réseaux d'évasion et de renseignements pour les Alliés. Plus tard, ils mettent en place de la même manière des filières d'évasion à partir des frontières pour les juifs menacés de déportation. Ils diffusent des tracts et des journaux clandestins qui dénoncent les mensonges de la propagande des nazis ou du gouvernement de Vichy.
Des organisations structurées naissent en zone occupée comme les mouvements Ceux de la Résistance, Défense de la France, Libération-Nord, et dans la zone Sud, Combat, animé par Henry Frenay, Libération-Sud avec d'Astier de la Vigerie et Franc-Tireur...
En 1941, le Parti communiste entre dans la Résistance après l'invasion de l'URSS par l'Allemagne nazie. Il apporte à la Résistance son expérience de la clandestinité, son sens de l'organisation et ses nombreux militants motivés par leurs idées politiques. Les communistes et leur organisation militaire (Franc-Tireurs Partisans) organisent des attentats contre les Allemands, notamment des officiers. En représailles, les forces d'occupation exécutent des otages. Après 1943, de nombreux jeunes qui refusent le STO, service de travail obligatoire à effectuer en Allemagne, viennent grossir les rangs de la Résistance. Les maquis se développent.
Les attentats contre les transports de troupes et de marchandises vers l'Allemagne se multiplient. C'est la bataille du rail.
La répression allemande, aidée par les collaborateurs de Vichy, est impitoyable ; les résistants sont pourchassés, torturés, exécutés ou déportés.
Complément(s)
Autre(s) ressource(s)
Site(s)
La présentation du service d’Art et d’histoire Auxois-Morvan.
Le musée de la Résistance en ligne propose un déroulé assez preécis de l’affaire Werner entre le 24 janvier et le 29 février 1944. Chaque nom de victime est associé à une référence du Service historique de la Défense à Vincennes :
resistantsdeportes21.com, le site di Comité de Parrainage du Concours national Scolaire de la Résistance et de la Déportation de la Côte d’Or présente de façon succincte l’Affaire Werner et toutes les communes de Côte d’Or qui eurent à en souffrir :
Les notices des fusillés du 1er mars sur le Maîtron, à la rubrique du Dictionnaire des Fusillés après condamnation et comme otages fournissent de précieux renseignements sur plusieurs des victimes de l’affaire Werner, et notamment à propos de celles dont le nom figure sur le monument de Villy-en-Auxois.