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Le monument aux morts de Vitteaux

Vitteaux | Côte-d'Or | Pays d'Art et d'Histoire Auxois Morvan | 1921
Époque contemporaine | La guerre aux XIX et XX ème siècle

© Daniel Janichon - Inauguration du monument de Vitteaux, 21 juin 1921

Un hommage laïque et consensuel

Le premier monument aux morts de Vitteaux est religieux (surmonté d’une statue de la Vierge) et mentionne le nom des grandes batailles de la guerre « 1914-1919 ». Les noms des hommes, eux, ont été gravés sur des plaques à l’intérieur de l’église (au centre du cimetière), de part et d’autre du chœur. Mais, à l’initiative d’une association d’anciens combattants de la guerre de 1870, la construction d’un monument civil est décidée dès juillet 1919. Plusieurs projets sont examinés, un impôt spécial est levé et le sculpteur François Clermont est désigné en septembre 1920 pour graver sur le monument les noms de quarante-deux soldats. Au début de 1921, la « bascule » est déplacée pour libérer la place du même nom et quatre obus de 280 sont acheminés depuis Orange pour délimiter le terrain autour du monument. L’inauguration peut avoir lieu, le 21 juin 1921. Restera encore, entre 1922 et 1925, à construire une bordure en pierre de taille et une grille en fer forgé pour clôturer cet espace « sacré » entourant l’imposant monument de marbre gris érigé « à ses morts glorieux » par « la ville de Vitteaux reconnaissante ».

En savoir plus

Quarante-deux « morts glorieux »…

Après la Première Guerre Mondiale, seules les victimes de ce conflit figurent sur le monument. Classés par année de décès – mais pas toujours dans l’ordre exact dans lequel ils tombèrent, se retrouvent ici les noms de natifs de la commune ou du canton, mais aussi ceux d’hommes qui habitaient Vitteaux au moment de leur mobilisation. Ainsi, tous les noms du monument « laïque » se trouvaient-ils déjà dans l’église de Vitteaux, mais certains figurent également sur les monuments de communes voisines, comme si on s’était disputé l’honneur de les honorer… Le premier nom est celui d’un cultivateur d’un bourg voisin, brun aux yeux gris. Cavalier (mais également habile à pratiquer le « vélocipède ») dans le civil avant que d’être fantassin, il est « tué à l’ennemi » le 5 octobre 1914 à Ronchin, dans le Nord, sans qu’on n’ait pu retrouver son corps.

En explorant le site « mémoire des hommes » qui recense la plupart des soldats de la guerre 1914-1918 « morts pour la France », il est en effet possible de recueillir des renseignements précis sur chacun de ces hommes. Ces renseignements permettent d’avoir accès d’une part à la fiche matricule de chacun d’eux (disponible en ligne sur le site des Archives départementales de la Côte d’Or), d’autre part au « Journal des Marches et Opérations » de son régiment (sur le site mémoire des hommes) qui décrivent avec force détail ce que faisait son unité le jour de sa mort.

Ainsi peut-on savoir qu’un jeune agriculteur, entre Pouilly-en-Auxois et Arnay-le-Duc avant son service militaire, a dû enchainer ce dernier avec la Grande guerre deux ans plus tard. Il est dans la Meuse en 1917 lorsque, « chargé d’exécuter la liaison entre l’artillerie et l’infanterie au cours de l’attaque du 17 juillet » il est « tué à son poste de combat en marchant avec les vagues d’assaut ». Le monument devient ainsi le premier document d’une série d’autres témoignages du passé qui rend chacun d’eux saisissant de proximité.

Daniel Janichon, professeur d’histoire-géographie

Contexte

Combattre pendant la première Guerre mondiale : les poilus 

Des conditions de vie terribles 

Le quotidien du poilu dans sa tranchée est terrible : le froid, l'humidité, la boue, la faim, la soif, les poux, les rats et surtout la peur constante, la mort omniprésente.  
Les combats sont atroces, les corps pulvérisés par les gros calibres d’artillerie.  
Les pertes engendrées par les armes nouvelles issues de l'industrie sont considérables. À chaque assaut, un homme sur trois est tué ou atrocement mutilé. On dénombre après les trois jours de l'offensive du général Nivelle en 1917 40 000 tués et 90 000 blessés. Et les batailles n'ont jamais été aussi longues  : Verdun dure dix mois ! Les soldats, mais aussi les populations civiles, subissent ces violences physiques et psychologiques inouïes.  
Mais le conflit familiarise aussi les soldats et les peuples à ce degré de violence et aux morts innombrables. Il provoque des comportements toujours plus brutaux. Des anciens poilus ont expliqué l'effroi premier devant la mort, puis peu à peu une habitude, voire un plaisir difficilement avouable de la donner. Ce consentement à la violence et à la mort subies et données a été nommé par les historiens « l'ensauvagement » ou la « brutalisation ». 
Il explique en partie la violence politique de l'Entre-deux-guerres qui s'épanouit dans les mouvements fascistes et nazis. 

Complément(s)

Image(s)

 

Cérémonie au monument aux morts de Vitteaux le 11 novembre 2021
© Daniel Janichon

Site(s)

 

  • Ce site recense la plupart des soldats de la guerre 1914-1918 « morts pour la France ».

 

  • Les registres de recrutement militaire recensent, chaque année, tous les jeunes gens âgés de 20 ans nés dans le ressort du bureau de recrutement. Ils fournissent des renseignements d’état civil, des caractéristiques physiques, le degré d’instruction, les états de service. A retrouver ici.

 

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