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Le cours d’action morale à Joigny (1942-1943)

Joigny | Yonne | Archives départementales de l'Yonne | 1942
Époque contemporaine | La guerre aux XIX et XX ème siècle

(c) Archives départementales de l'Yonne

En 1943 est paru Une heure d’action morale, un ouvrage à destination des Jeunes publié par Camille Flamand, avec les services du gouvernement de Vichy. Cet ouvrage devait sans doute être utilisé par les professeurs dans le cadre de cours d’Action morale. Ces cours ont été mis en place en mars 1942 au collège de Joigny. Pierre Vauthier, professeur de Lettres et d’Histoire-Géographie, a eu en charge cette heure de cours pour les classes de 4e et de 3e.
En avril 1943, à la suite d’une violente altercation entre Pierre Vauthier et un de ses collègues et une plainte, des accusations sont formulées par ce collègue contre le premier. Le principal demande alors à Pierre Vauthier de faire un compte-rendu du travail mené avec ses classes dans le cadre de son cours d’Action morale. Lorsqu’il le fait parvenir à l’inspecteur d’académie, il souligne le fait que « les classes dirigées par M. Vauthier sont celles qui apportent le plus de collaboration aux diverses œuvres d’entr’aide et de solidarité ».

En savoir plus

Il semblerait que les cours d’Action morale ont eu pour but de renforcer l’unité des Français derrière le Maréchal. Ils font partie du plan d’endoctrinement des jeunes, particulièrement important à l’école primaire, qui se poursuivait au collège notamment à travers les programmes d’Histoire et de Géographie.
P. Vauthier, militant et secrétaire fédéral de la SFIO dans les années 1930, était profondément opposé à la politique de Révolution nationale et de collaboration du gouvernement de Vichy. À partir de juin 1943, il participa à l’implantation du mouvement Libération-Nord dans l’Yonne et en devint le responsable civil. Il fut arrêté en mars 1944 et déporté.
Dans les classes de 4e et de 3e dont il avait la charge en Histoire-Géographie, Lettres et Action morale, il a impulsé d’importants mouvements de solidarité sans entrer réellement dans les objectifs de propagande vichyste des cours d’Action morale. Ses élèves ont participé à des collectes pour l’achat de portraits du Maréchal et pour la « fête des jeunes » du 1er mai 1942, ce qui entrait sans doute parfaitement dans le cadre voulu pour ces cours. P. Vauthier a également fait prendre conscience à ses élèves des difficultés dans lesquelles vivaient certaines familles et soutenu des actions de solidarité en leur faveur. Mais surtout, dès mars 1942, il a amené ses élèves à parrainer des prisonniers de guerre. Sa classe de 4e n’a alors pas choisi un prisonnier quelconque mais un « prisonnier de couleur, malgache ou annamite ». Ces prisonniers issus des colonies étaient les plus nombreux sur le territoire français puisque les autorités d’occupation n’avaient pas voulu qu’ils soient envoyés en Allemagne ; mais il est évident que ce geste n’allait pas dans le sens de la politique raciste du régime de Vichy.
Comme le montrent les rapports de l’inspecteur d’académie et du commissaire des Renseignements généraux, ce travail effectué dans le cadre des cours d’Action morale a pu le sauver provisoirement en 1943.
Nathalie Verpeaux, professeure d’histoire-géographie.

Contexte

Gouverner, l'État français 

Le 10 juillet 1940, les parlementaires français donnent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Son gouvernement supprime la République. Il la remplace par l'État français. Le Maréchal concentre entre ses mains les pouvoirs exécutif et législatif. Le suffrage universel est supprimé. 

Le Maréchal bénéficie d'un véritable culte de la personnalité. On célèbre le père de la Patrie, le héros de Verdun. 

Il lance la « Révolution nationale ». C'est une revanche sur la tradition républicaine, le Front populaire de 1936 et sur tous les acquis libéraux et démocratiques depuis 1789 ! 

Cette politique repose sur une idéologie réactionnaire : pour que la France se redresse, il faut revenir aux valeurs traditionnelles exprimées par la devise «Travail, Famille, Patrie ». 

Les anciens partis et les syndicats sont interdits et réprimés. 

Sans aucune pression allemande, ce gouvernement antisémite promulgue un statut des Juifs. Certains métiers leur sont interdits. La police de Vichy collabore aux rafles. C'est Laval, Premier ministre de Pétain, qui propose aux autorités allemandes de déporter également les enfants des Juifs étrangers. Vichy livre ainsi aux nazis 75 721 Juifs. Seulement 2 500 reviendront des camps de concentration et d'extermination. 

L'école est très contrôlée. Des organisations comme les Chantiers de la jeunesse encadrent les jeunes. 

La natalité est encouragée. C'est le maréchal Pétain qui instaure la fête des mères en France. 

En novembre 1942, les Allemands envahissent la zone sud. La collaboration s'accentue alors. Le régime de Vichy prend des formes qui le rapprochent de plus en plus des fascismes. La Milice pourchasse, aux côtés des Allemands, les résistants. 

Si les Français sont dans leur majorité maréchalistes, attachés à la personne de Pétain, ils sont peu pétainistes, c'est-à-dire partisans de la « Révolution nationale ». 

Seule une toute petite minorité de Français est franchement collaborationniste. La majorité est surtout préoccupée par les difficultés de la vie quotidienne. 

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