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La barricade de la rue Jeannin

Dijon | Musée de la vie bourguignonne | 1890
Époque contemporaine | La guerre aux XIX et XX ème siècle | République et vie politique XIXe-XXe siècles

© Musée de la Vie bourguignonne

L’oeuvre de Paupion est très réaliste. La scène se déroule dans la rue Jeannin. Au premier plan, on voit la barricade composée d’un fourgon, d’une charrette, d’une table, de poutres et de pavés. Derrière cette protection, on distingue plusieurs tireurs dont quatre sur la rue et trois autres installés aux fenêtres. Derrière cette première ligne, le capitaine d’une compagnie de Francs-Tireurs, Jean-Jean Cornu et le lieutenant Calami ordonnent de monter la barricade. Au centre du tableau, une femme, Marie Berthaud, distribue des fusils munis de baïonnettes. À ses côtés, des hommes s’emparent de munitions dans une brouette.

La fumée indique l’explosion d’un obus et on voit à droite sur le trottoir, un soldat blessé au visage soigné par une soeur de Saint-Vincent. Derrière eux, deux brancardiers évacuent des soldats blessés. À l’intersection de la rue Jeannin et de la rue Saumaise, trois hommes à képi se dirigent vers la barricade sur ordre du lieutenant Aubaine. En arrière-plan, deux hommes courent en direction de la barricade et deux silhouettes s’enfuient afin d’éviter les obus. La tour de l’église Notre-Dame au fond situe la scène à Dijon.

En savoir plus

Édouard Paupion a voulu rendre hommage à ces hommes et à ces femmes qui se sont sacrifiés pour défendre leur ville. Il a représenté ici une scène de la première bataille de Dijon, à laquelle, alors âgé de 16 ans, il a peut-être assisté. L’historien Clément-Janin a publié en 1873 une description précise de cette bataille, en y incluant les noms des participants. On pense que le peintre s’en est fortement inspiré. Clément-Janin parle de 600 victimes mais oublie les pertes civiles qui sont pourtant au coeur de cette barricade citoyenne, ce qui rend le bilan peu fiable.  C’est cette vaillance, ce refus de céder sans combattre et cette honneur défendu par les Dijonnais eux-mêmes que le peintre Édouard Paupion a peint.

Édouard Paupion est né à Dijon le 21 Août 1854 sous le Second Empire. Il est élève l’école des Beaux-Arts de Dijon. Il se rend à Paris et entre dans l’atelier du peintre Gérôme de 1874 à 1881. Il ne cessera alors d’exposer ses oeuvres au Salon de Paris et reçoit même en 1896 la médaille du Salon des Champs- Elysées pour sa toile « Le sommeil de la Vierge ». Il voyage en Algérie et en Italie où il réalise de nombreuses scènes de la vie quotidienne d’où son rattachement au courant pictural du Réalisme comme avec sa toile « Porteuse d’eau à Venise » en 1883. À son retour, il s’installe à Dijon et retrace alors avec précision deux épisodes historiques de la guerre franco-prussienne : « La barricade de la rue Jeannin » et « La prise du drapeau au 61ème Poméranien ». Les thèmes historiques sont plutôt rares dans son oeuvre, il peint surtout des scènes de la vie quotidienne. Il décède en 1912 à Orchamp à l’âge de 60 ans.

Contexte

La guerre que déclare Napoléon III à la Prusse (19 juillet 1870) ne touche tout d’abord pas la Côte d’Or. Certes, l’écho des terribles défaites d’août en Alsace et en Moselle parvient jusqu’à Dijon, ainsi que la capture de l’Empereur à Sedan le 2 septembre 1870. Mais ce n’est que près de deux mois après la proclamation de la République à Paris par Gambetta, (4 septembre 1870) que l’armée va affronter en Côte d’Or ses premiers « Prussiens » - en fait, des Badois, alliés à la Prusse au sein de la Confédération des États Allemands. La 1ère bataille de Dijon (qui laissera son nom à la « place du 30 octobre ») se soldera, après une défense acharnée des Gardes mobiles et des habitants, par l’occupation de la ville (30 octobre 1870 – 27 décembre 1870). Entre-temps, Giuseppe Garibaldi, arrivé en France le 7 octobre s’était vu confier dès le mois suivant par le gouvernement provisoire la mission de reprendre l'initiative en Côte d’Or à la tête de l’Armée des Vosges. Son fils Ricciotti réussit un fameux coup-de-main le 19 novembre 1870 à Châtillon-sur-Seine. Malheureusement Garibaldi échoue à reprendre la capitale de la Bourgogne lors de la 2ème bataille de Dijon du 25 au 27 novembre 1870. De son côté, le Général français Crémer inflige une lourde défaite aux Badois le 3 décembre 1870 à Châteauneuf-en-Auxois. Il remporte également la victoire à Nuits le 18 décembre 1870 et entre dans Dijon en libérateur le 30 décembre 1870. Ces succès français feront dire au Général von Werder : « Ce n'est pas la Côte d'Or, ce pays, c'est la Côte de Fer ». Début janvier 1871, ce sont encore les Francs-tireurs de Ricciotti Garibaldi qui vont harceler les forces de la “Sud-Armée” à Crépand. Ce sont eux que l’on retrouve également les 21-22-23 janvier 1871 (3ème bataille de Dijon) où le chasseur Curtat prend le deuxième et dernier drapeau arraché à l’ennemi durant cette guerre. Malgré cela, un armistice est signé fin janvier 1871, lequel exclut les départements du Jura, du Doubs et…de la Côte d’Or, le tout nouvel « Empire allemand » (18 janvier) se réservant le droit de poursuivre jusqu’au bout Garibaldi et l’Armée de l’Est qui s’y trouvent encore. N’ayant pu délivrer Belfort, les 87000 soldats survivants de cette dernière (les « Bourbaki ») se constituent prisonniers…en Suisse, aux Verrières, le 1er février 1871. Si le traité de paix franco-allemand n’est signé (à Francfort) que le 12 mai 1871, il faudra attendre la veille du 30 octobre 1871 pour voir les troupes d’occupation quitter Dijon…

Complément(s)

Image(s)

Le tableau annoté d’Edouard Paupion

 

 

 

 

 

 

 

 

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