retour

Aidez l’Espagne

Vézelay | Yonne | Musée Zervos | 1937
Époque contemporaine | La guerre aux XIX et XX ème siècle

© musée Zervos, Vézelay - CDY 2024

En 1937, Juan Miró réalise un projet de pochoir, « Aidez l’Espagne » à la demande de Zervos pour éditer un timbre afin de collecter des fonds pour aider l’Espagne Républicaine. Ce pochoir en couleurs figure dans le volume Cahiers d’Art 4 -5 de 1937.

Le titre est un slogan, à l’impératif, comme une injonction aux Français à soutenir le peuple espagnol. Le béret (barettina) rouge caractérise la figure du paysan catalan. C’est un homme fier qui garde la tête haute. Miró a une bonne connaissance du monde paysan catalan de par ses origines et le choisit pour provoquer un grand impact visuel.

Le poing et le bras surdimensionnées reflètent une image de propagande, attirant l’attention sur ce geste de révolte, le poing levé, et appelle à une solidarité internationale. Miró utilise les trois couleurs primaires. Cela accentue la force du message. Le jaune de l’or et le rouge du sang sont les couleurs du blason catalan, complétées par le bleu du ciel catalan. Le cercle rouge représente le soleil rouge de catalogne.  « Ce pochoir résume les Cahiers d’Art : c’est une image risquée, qui engage autant l’éditeur que l’artiste. Sans se réclamer des révolutionnaires, elle incarne la révolte. Elle rate son objectif : Franco et la dictature ont vite raison de sa propagande. Elle aura une seconde vie, durable dans tous les ouvrages qui lieront l’art et la contestation. » dit Christian Derouet.

En savoir plus

Cette œuvre devait être éditée en timbre pour accompagner les cartes postales de Picasso. Cela explique la présence du prix de vente « 1 franc ». Ce projet ne verra finalement pas le jour. « Ce timbre, explique Miro, coûtait un franc. Cette œuvre fut aussi agrandie et reproduite en tirage limité avec le texte suivant, écrit de ma main et signé « Dans la lutte actuelle, je vois du côté fasciste les forces périmées, de l’autre côté le peuple dont les immenses ressources créatrices donneront à l’Espagne un élan qui étonnera le monde. »

Avec ce franc, qu’on peut associer au « franc symbolique », on peut aider cette Espagne Républicaine combattante et à travers elle des millions de civils espagnols, sans que ce don ne soit impactant pour un ménage français.

Seul un personnage occupe presque toute l’image de l’affiche. Miró  peint cette affiche comme s’il s’agissait d’un collage, comme si le personnage était morcelé, une métaphore de l’Espagne divisée, représentée par un homme et non par une carte.

Les couleurs juxtaposées montrent une Espagne fragmentée, mais comme le fier Catalan, elle garde la tête haute et va continuer à lutter contre le fascisme. Le personnage a des yeux ronds et cernés de noir comme sortis de leurs orbites.

« Que les puissances de régression connues sous le nom de fascisme s’étendent, qu’elles nous plongent un peu plus avant dans l’impasse de la cruauté et de l’incompréhension, et c’en est fini de toute dignité humaine. » dit Joan Miró.

En 1937, il se voit contraint de quitter l’Espagne pour rejoindre la France à cause de la guerre. Son œuvre va être influencée par le conflit, autant dans les couleurs que dans les formes qu’il crée. Depuis la France, des artistes espagnols -Picasso, Miro- se voient dans le devoir de dénoncer le franquisme, et soutiennent la cause de l’Espagne républicaine. En tant qu’artistes c’est avec leurs œuvres qu’ils vont le faire.

Cédric Micchi, enseignant d’arts plastiques, missionné auprès de la conservation départementale des musées du Conseil Départemental de l’Yonne.

Contexte

En 1936, la victoire du Frente popular aux élections législatives provoque le soulèvement du général Franco, partisan d’un régime autoritaire fondé sur l’armée et l’Eglise. C’est le début d’une guerre civile sanglante qui se termine par la fin de la République espagnole en 1939. Alors que les démocraties occidentales défendent le principe de la non-intervention pour ne pas déstabiliser l’ordre européen, l’Italie et l’Allemagne soutiennent Franco en lui envoyant des hommes et du matériel militaire. De son côté, l’URSS de Staline envoie aux républicains espagnols du matériel et des experts militaires, tandis que de nombreux communistes européens s’engagent dans les Brigades internationales. La guerre d’Espagne montre l’impuissance des démocraties occidentales.

Complément(s)

Autre(s) ressource(s)

Vous pouvez consulter la fiche sur la façon dont la magazine Vu parle de la guerre d’Espagne : c’est ici.

Abonnez-vous à notre lettre d'information !

et restez informé(e) de l'actualité du site

retour