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Le chêne de Flagey

Ornans | Doubs | Musée Courbet | 1864
Époque contemporaine | République et vie politique XIXe-XXe siècles | Société du XIX ème siècle à 1945

(c) Musée Courbet

Gustave Courbet a choisi de représenter un arbre bien particulier, celui qui a pris racine sur la terre de son enfance, à Flagey où son père Régis Courbet possédait une ferme.
Ce tableau a été présenté au public en 1867 en marge de de l’Exposition universelle à Paris, dans une exposition personnelle que l’artiste a organisé dans son propre pavillon. A cette occasion, le titre de l’œuvre est modifié avec la mention Chêne de Vercingétorix, camp de César près d’Alésia et offre au regardeur une autre clé d’interprétation, en faisant entrer son tableau dans les vifs débats de l’époque concernant la localisation du site gaulois d’Alésia.
Le peintre, jusque-là plutôt réticent aux scènes historiques invente ici un nouveau mode d’expression pictural, en faisant du tableau à la fois un paysage, un message politique et un autoportrait.
Ce tableau est aussi intitulé Chêne de Vercingétorix, camp de César près d’Alésia. C’est une huile sur toile de 89x110cm.

En savoir plus

L’arbre tient une place centrale dans la composition de l’œuvre. La largeur du tronc est ainsi valorisée. L’artiste a choisi de tronquer le faîte de l’arbre ainsi que des branches latérales offrant au spectateur une vue rapprochée, à hauteur d’homme. Le chêne donne alors l’impression de déborder du cadre, ce qui lui donne une force supplémentaire. Ce choix de composition est tout à fait novateur et rompt avec le paysage romantique ou pittoresque, en faisant de l’arbre le « personnage » central de l’œuvre. La scène est cependant animée par la course d’un chien blanc poursuivant un lièvre brun, la vitesse contrastant ici avec la force immobile de l’arbre.

Au travers de cette œuvre, Courbet affirme ses convictions républicaines et son hostilité au Second Empire. En effet, le peintre sous-titre son œuvre « chêne de Vercingétorix », plaidant ici la cause d’une Alésia franc-comtoise, à l’encontre de la thèse officielle (défendue par Napoléon III et établie à partir des fouilles archéologiques commanditées par l’empereur) qui plaçait le site de la bataille en Côte-d’Or. Il fait ainsi entrer l’arbre le plus majestueux de son village dans la peinture d’histoire, genre le plus valorisé par l’Académie des Beaux-Arts et par le public en général.

Le chêne de Flagey est encore considéré comme un autoportrait. En effet, la symbolique du chêne renvoie à la force et à l’enracinement. Elle évoque ainsi l’attachement profond du peintre à ce territoire intime où il puise la richesse de sa création. Par ailleurs, ce chêne s’impose au spectateur, comme le peintre s’impose dans le paysage artistique de son époque, ce que Courbet ne craint pas d’affirmer avec provocation. Enfin, le titre complet de l’œuvre explicite les engagements intellectuels du peintre et renforce sa signification.
Elise Barbe-Zolnet, professeure missionnée pour le pôle Courbet

Contexte

Au XIXème s’épanouit la peinture de paysage, genre jusque-là considéré comme mineur car il offre avant tout un décor pour des scènes mythologiques ou bibliques. A l’inverse la peinture d’histoire (scènes biblique, mythologique ou encore les grands événements historiques nationaux) constitue le genre le plus prestigieux. Le réalisme de Courbet, puis les recherches impressionnistes, renversent la hiérarchie en donnant une dignité nouvelle au présent et au quotidien. Ainsi, quand Courbet peint Le Chêne de Flagey, il détourne les codes de la peinture d’histoire : il substitue au héros antique ou biblique un simple arbre local qu’il élève au rang de monument. Elise Barbe-Zolnet, professeure missionnée pour le pôle Courbet

Complément(s)

Site(s)

Ivan JABLONKA, « Le paysage français », Histoire par l’image

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