L’Astronomie des Césars
Astronomicum Caesareum de Pierre Apian, dit Apianus (1495-1552), publié en latin en 1540, n’est pas seulement une somme de trois cents pages traitant d’astronomie et d’astrologie, c’est aussi l’une des plus belles publications scientifiques datant des débuts de l’imprimerie. Certains exemplaires de ce succès éditorial furent mis en couleur à la main, comme c’est le cas de celui conservé à la bibliothèque municipale de Dole.
Dédié à Charles QuintIl est élu empereur du Saint Empire romain germanique en 1519. Ses héritages européens et les possessions espagnoles d’Amérique le placent à la tête d’un empire sur lequel « jamais le soleil ne se couche ». Lassé, déçu par ses échecs, il abdique à Bruxelles le 25 octobre 1555. et à son frère Ferdinand Ier, cet ouvrage compile les nombreuses recherches de son auteur, professeur de mathématiques à l’université d’Ingolstadt (Allemagne), astronome et imprimeur. Pensé pour être un outil pratique, il se caractérise par la présence d’ingénieux cadrans rotatifs combinés appelés volvelles ou « équatoires », facilitant la compréhension et l’interprétation des mécanismes secrets régissant la course des corps célestes.
Ces disques mobiles superposés, judicieusement positionnés les uns par rapport aux autres par le lecteur, permettaient de déterminer la position des astres, mais aussi la longitude et la latitude des villes terrestres, éléments indispensables pour établir les horoscopes. Les informations astrologiques revêtaient à l’époque une importance déterminante, notamment dans le domaine de la médecine, pour poser les diagnostics et définir les traitements.
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En outre, les instruments d’Apian permettaient de connaître le calendrier des éclipses solaires et lunaires sur une période allant de l’an 7000 av. J.-C. à 7000 ap. J.-C, ainsi que le passage de certaines comètes et les grandes conjonctions des planètes supérieures, Saturne, Jupiter et Mars. Les esprits du 16e s. voyaient dans ces évènements des signes à décoder. La science du pronostic était donc essentielle à la bonne conduite des destinées politiques des Etats.
Concernant l’ouvrage de Dole, il est probable qu’il ait été acquis par les Jésuites au Collège de Dole vers 1596, bien que son origine exacte reste floue. Qu’il ait été acheté ou donné, il s’agit d’un livre prestigieux, représentant l’engagement des Jésuites dans la constitution d’une bibliothèque encyclopédique, reflétant leur volonté de promouvoir le savoir dans divers domaines.
En ce qui concerne les sciences de l’époque, l’ouvrage s’inscrit dans une période de transition, alors que le modèle géocentrique de Ptolémée, encore largement utilisé, sera bientôt remis en question par la théorie héliocentrique de Copernic. Néanmoins, depuis l’Antiquité jusqu’à la fin du 16e siècle, le système de représentation géocentrique a permis de comprendre avec une grande précision de nombreux phénomènes observés à l’œil nu. Il avait trouvé une large application dans les astronomies arabe et indienne mais aussi européenne.
En somme, l’Astronomie des Césars, malgré l’obsolescence quasi immédiate de son propos, est une œuvre à la fois scientifique et culturelle, illustrant les connaissances astronomiques avancées de son temps tout en participant à la diffusion de savoirs divers et à l’essor des réseaux scientifiques européens. Couronnant le travail constant de vulgarisation poursuivi par son auteur, elle offre par tous ses aspects un témoignage remarquable de ce que nous a laissé l’humanisme de la Renaissance.
Contexte
À la découverte du monde...
Sans les progrès hérités du Moyen Âge comme la boussole, les navigateurs n'auraient pu traverser l'Atlantique. Conjugués à l'évolution des techniques de navigation que symbolisent les caravelles, on assiste alors à ce qu'on a nommé les Grandes Découvertes. Les motivations politiques et religieuses n'en sont pas absentes. Henri le Navigateur, au début du XV ème siècle pour le Portugal, peut être considéré comme l'initiateur de ce mouvement d'ouverture sur le monde. Ce sont d'abord les côtes africaines qui sont explorées à partir de 1415 par ceux qu'on appelle les conquistadors. Il faut attendre 1489 pour que le cap de Bonne-Espérance soit franchi. Trois ans plus tard, Christophe Colomb atteint une île des Caraïbes, alors qu'il pense être arrivé aux Indes. En 1497, Amerigo Vespucci atteint le continent. C'est à Saint-Dié que paraît pour la première fois en 1507 un ouvrage où son prénom sert à désigner cette nouvelle terre découverte. L'Europe se retrouve alors au centre d'un commerce mondial. L'or, l'argent et les épices affluent.
Les certitudes des Européens sont ébranlées par la découverte de populations inconnues jusqu’alors. Au contact de ces cultures nouvelles, l’Europe cherche à les évangéliser. Soumis au travail forcé ou victimes de maladies jusqu'alors inconnues dans cette partie du monde, les Indiens d'Amérique sont décimés. En un siècle, c'est près de 80 % des Amérindiens qui disparaissent. Bartolomé de Las Casas, un religieux, condamne les exactions dont ils sont victimes. La mise en place de la traite des Noirs et du commerce triangulaire sert à pallier le manque de main-d'œuvre. Les puissances comme le Portugal ou l'Espagne se taillent de vastes empires coloniaux dans ces nouveaux territoires.
1492 demeure une date symbolique, considérée comme synonyme des débuts de l'époque moderne. Aujourd'hui pourtant, beaucoup d'historiens remettent en cause la validité de cette coupure chronologique.
Complément(s)
Site(s)
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