Charte donnée à la ville de Montbéliard par Renaud de Bourgogne, comte de Montbéliard et Guillemette de Neufchâtel
Une charte de franchises est un acte officiel accordé par le seigneur d’un lieu aux habitants de ce lieu, afin de fixer son organisation administrative. Il est souvent l’occasion pour le seigneur d’octroyer certaines libertés à ses sujets, tout en rappelant ce qu’ils doivent faire pour lui. Les chartes sont généralement renouvelées à chaque changement politique.
La première charte de franchises de la ville de Montbéliard date de 1283. Par cet acte, le seigneur supprime certains impôts (tailles et corvées), abolit la mainmorteDroit perçu par un seigneur sur les biens d’un dépendant (souvent un serf) lorsqu’il décède. (droit du seigneur sur les successions) et donne une autonomie administrative aux habitants (liberté d’élire parmi eux neuf représentants), qui moyennant le paiement du « toisé » (impôt foncier), peuvent devenir « bourgeois ».
Fixant les relations entre le seigneur et les habitants de Montbéliard pour cinq siècles, la charte de franchises est un document majeur de l’histoire médiévale de la ville.
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En 1283, la ville de Montbéliard obtient des franchises de la part de Renaud de Bourgogne et de sa femme Guillemette de Neufchâtel. Les seigneurs semblent accorder des privilèges aux habitants de la ville pour imiter la cité voisine de Porrentruy, concurrente de Montbéliard, qui a obtenu au printemps de la même année des franchises de la part de Rodolphe de Habsbourg. D’autres villes en Europe ont obtenu des franchises à la fin du XIIIe siècle, et plus rarement à la fin du siècle précédent.
Avec cet acte, l’état de dépendance des habitants de Montbéliard envers le seigneur prend fin. Les « bourgeois » bénéficient de libertés pour eux-mêmes et pour leurs descendants, même si un temps minimum de résidence dans la ville est exigé, et que la vente de la totalité des biens s’accompagne de la perte du statut.
Parmi les libertés octroyées, la mainmorteDroit perçu par un seigneur sur les biens d’un dépendant (souvent un serf) lorsqu’il décède. et le formariage (impossibilité pour un habitant de se marier avec un conjoint ne dépendant pas du même seigneur) sont abolis, même s’il est probable que le seigneur n’en usait déjà plus. D’autres taxes sont également supprimées. En contrepartie, le comteDurant le Haut Moyen Âge et sous l’Empire carolingien, représentant du pouvoir du roi ou de l’Empereur dans des régions appelées comtés. Vers l’An Mil, les comtes deviennent de puissants seigneurs à la tête de leur comté, indépendants de fait du pouvoir royal. exige le « toisé », impôt de un sou par toise de façade de maison.
Mais surtout, c’est l’autonomie administrative créée par la charte qui est le fait majeur du document. Neuf bourgeois sont élus annuellement pour diriger la ville, et l’un d’entre eux porte le titre de « maître bourgeois ». Les bourgeois doivent également composer avec l’administration du seigneur, qui choisit un maire pour le représenter. L’original de ce document est consultable aux Archives municipales de Montbéliard, il s’agit du document le plus ancien conservé dans le dépôt. Plusieurs transcriptions de cet acte existent, dont cette version de 1775 imprimée à Bâle.
Service éducatif des Archives municipales de Montbéliard
Contexte
Gouverner les villes au Moyen Âge
Dans les villes, les habitants dépendent d'un seigneur. Souvent, il s'agit d'un seigneur ecclésiastique, évêque ou archevêque. Les bourgeois rassemblés en commune remettent en cause l'autorité de ces seigneurs. Parfois éclatent des révoltes sanglantes comme à Laon en 1112, où l'évêque est tué. Sous la pression, les seigneurs accordent des chartes de franchises aux bourgeois, qui leur permettent de s'administrer eux-mêmes. Les plus riches élisent un conseil d'échevins qui se réunit dans un hôtel de ville. Les villes apparaissent comme un premier espace de liberté dans le cadre de la société féodale.
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