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L’art des devises

Bussy-le-Grand | Côte-d'Or | 1669
Époque moderne | Le temps des rois

© Centre des monuments nationaux

Une devise est une image simple mais percutante, accompagnée d’une courte sentence qui a pour but de commémorer une occasion, un sentiment ou une personne, par une composition énigmatique.

La Salle des devises est certainement l’une des pièces les plus curieuses du château de Bussy-Rabutin, révélant la complexité, la sensibilité et la grande culture de Roger de Rabutin. Elle témoigne également de son éducation jésuite puisqu’il y recrée les exercices de fin d’année auxquels ses professeurs l’avaient habitué. En outre, cet art énigmatique lui permit de mettre en avant sa grande érudition et ses dons intellectuels (peu de personnes étaient capables de les comprendre, encore moins d’en réaliser). Il corsa le jeu en choisissant de rédiger les sentences dans quatre langues : français, latin mais aussi espagnol et italien. Roger de Rabutin poussa ce jeu à son apogée dans sa demeure : trente-huit devises y prennent place, majoritairement dans la salle mentionnée.

En savoir plus

La devise est obligatoirement constituée d’une phrase, faisant office de titre, et d’une image : en effet, les théoriciens de cette nouvelle pratique y voyaient « une métaphore peinte », une image-idée. On doit pouvoir saisir le sujet principal, qui se retrouve toujours au premier plan et souvent d’une taille plus importante que l’échelle de la représentation, le fond est donc volontairement épuré et sobre. Toutefois, la devise doit rester suffisamment énigmatique pour ne pas être comprise de tous. La haute société de l’époque était encore imbue d’idéaux héroïques et chevaleresques et manifestait par ailleurs un goût prononcé pour les énigmes et les allégories, tant par jeu et dilettantisme raffiné que pour dissimuler au commun des mortels ce qu’elle tenait à se réserver comme un privilège de classe. Ammirato écrivait ainsi en 1562 : « De même que le philosophe, à travers les fables, commença à dévoiler ses merveilleux et divins secrets pour se faire entendre de certains et non de tous, de même le chevalier, pour dévoiler à certains et non à tous ses intentions, recourut à la fiction des devises ». Ainsi, la devise se trouve-t-elle principalement constituée d’allégories, de symboles, d’objets métaphoriques se référant à une personne (ou éventuellement une occasion), elle est par nature énigmatique, réservée aux initiés et ne peut se permettre de représenter directement la personne en question dans l’image. Roger de Rabutin contourna néanmoins cette règle en intégrant le visage de son ancienne maîtresse, Madame de Montglas, dans les six devises qui la concernent. Il se justifia en déclarant que, puisqu’il était admis d’y faire figurer des monstres, il convenait de la regarder comme tel. L’incription (le motto), quant à elle, n’excède pas six mots : elle doit être percutante car elle fait office de facteur de jonction et permet d’orienter la signification de l’image dans la direction souhaitée par son concepteur. Il est conseillé de forcer l’attention en utilisant une langue étrangère pour le motto. Au XVIIe siècle, l’exercice de la devise devient un jeu pour les esprits cultivés. Elle doit être suffisamment obscure pour ne pas être comprise de tout le monde et le recours à des langues étrangères s’impose rapidement.

Contexte

Imaginer et réaliser à la fin du XVIe siècle 

Au tournant des XVIe-XVIIe siècles, la Renaissance s’achève. Elle a donné naissance à un élan créateur qui ne s'arrête ni dans les arts, ni dans les sciences. L'astronomie connaît de grands progrès. La Renaissance avait multiplié les travaux et observations tout azimut sans véritablement aboutir à une méthodologie scientifique rigoureuse. Pourtant, en 1543 déjà, le moine polonais Nicolas Copernic propose comme hypothèse mathématique un nouveau modèle de l'univers. Il place le Soleil au centre d'un système où les planètes, dont la Terre, tournent autour. C'est le système héliocentrique. Plus tard, au début de XVIIe siècle, commence la véritable révolution scientifique. L'Italien Galilée (1564-1642) est physicien, écrivain et astronome. Il faut, d'après lui, expliquer les lois physiques en utilisant les mathématiques. Il travaille sur l'accélération de la chute des corps. En 1609, il introduit l'usage de la lunette astronomique : c'est une révolution ! Il découvre un univers inconnu, l'aspect des planètes, les lunes de Jupiter, les cratères et les montagnes sur la Lune... Ses travaux prouvent que Copernic avait raison. Ce n'est pas la Terre qui est au centre de l'univers mais le Soleil.  

Dans le domaine artistique, avec des peintres comme le Titien (mort en 1576), la Renaissance dure au-delà de 1550. Durant la même période, pourtant, le maniérisme s'épanouit. Ce terme exprime à la fois l'imitation, mais aussi le dépassement de l'héritage de la Renaissance. Michel-Ange (mort en 1564) en Italie s'affirme maniériste comme les peintres Le Greco (1541-1614) en Espagne, Peter Bruegel l'Ancien (mort en 1569) en Flandres ou Jean Cousin (mort vers 1560) en France. Vasari (mort en 1574) en Italie bouleverse aussi les règles architecturales de la Renaissance. Il abandonne la superposition en étage des ordres de colonnes (dorique, ionique, corinthien) pour ne garder que les colonnes au rez-de-chaussée. À l'étage, il se sert de consoles étirées entre les fenêtres. 

Complément(s)

Image(s)

   « Elle attire pour perdre »

 

 

 

 

 

 

 

 

  « S’il me regarde, ils me regardent »

 

 

 

 

 

 

 

    « Qui me mordra pleurera »

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