Monument de la place Carnot « Aux enfants de la Nièvre, morts pour la France »
Le monument départemental aux morts est situé place Carnot en centre-ville de Nevers. Initié par la ville de Nevers en 1918, confié au sculpteur nivernais Alix Marquet et à l’architecte Claude Camuzat, le monument est inauguré, après de multiples rebondissements, le 1 novembre 1923 par le président de la République Raymond Poincaré. Cette œuvre monumentale présente un groupeEnsemble de plusieurs éléments semblables More sculpté en bronze qui repose sur un socle en pierre taillée. Le groupeEnsemble de plusieurs éléments semblables More est composé d’un poilu blessé qui piétine l’aigle germanique et d’une femme en deuil s’apprêtant à poser la couronne du souvenir au pied du monument, tout en coiffant le soldat d’une couronne de laurier. Le socle épuré est flanqué aux quatre points cardinaux des écussons de la ville de Nevers, Cosne-Cours-sur-Loire, Clamecy et Château-Chinon. Sur le devant est inscrit « Aux enfants de la Nièvre morts pour la France » et sur le large dessus sont posés des casques « Adrian », représentation du poilu par excellence et des drapeaux brisés. La symbolique du casque est omniprésente autours du socle. Tous les corps d’armée (infanterie, artillerie, chasseurs, génie, marine, cavalerie, service santé, colonies, aviation…) que l’on reconnaît grâce aux attributs frontaux, sont évoqués. Des bornes et des chaînes entourent le monument. Chaque borne est coiffée d’un casque.
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Pour honorer les soldats tués pendant la Première Guerre mondiale, le conseil municipal décide de constituer dès l’armistice, un comité composé d’une soixantaine de personnes. Son président est Alfred Massé, ancien député et ancien ministre. Parmi ses membres figurent le directeur des forges de la Chaussade, l’évêque de Nevers et le pasteur. Le journal Paris Centre rappelle dans son édition du 6 février 1919 que le comité souhaite « éviter la multiplicité des initiatives locales ».
Un devis et une esquisse d’un projet de monument présentés par l’entreprise Demay Frère conservés aux archives sont déposés en mairie. On peut voir qu’il prévoyait un caveau dans lequel on pourrait descendre, avec à l’intérieur des plaques portant le nom des morts. Une souscription est lancée dans tout le département. C’est à Alix Marquet, sculpteur nivernais, que l’on confie la réalisation du monument, l’architecte Claude Camuzat le socle en pierre. Cependant des interrogations voient le jour quand, plus d’un an après, on entend plus parler du comité. Le journal Paris centre publie le 21 août 1920 un article dans lequel il fustige le comité, au point de se demander s’il existe toujours. En effet deux obstacles se dressent contre la réalisation du projet : d’une part, Le comité n’a recueilli que 92 000 francs, soit la moitié de la somme nécessaire. Une nouvelle souscription est lancée et les initiatives privées se multiplient (concerts, kermesses). En 1922, il manque encore 55 000 francs. D’autre part, l’emplacement du monument fait débat. Le journal Paris Centre organise un référendum … ouvert aux femmes !
A quelques jours de la fin du scrutin, le journal donne la parole à Alix Marquet qui se prononce pour l’entrée du parc de Nevers, au cœur de la ville. Les résultats sont publiés le 29 octobre 1922 et l’entrée du parc arrive largement en tête. Les travaux commencent en 1923 et l’inauguration est fixée le jeudi 1 novembre 1923 en présence du président de la République Raymond Poincaré Le 17 juin 1940, les troupes allemandes entrent dans Nevers et le monument aux morts qui porte les traces de la dernière défaite n’est pas du goût de l’occupant. Le maire de la ville, Michel Gaulier, doit faire ôter la tête de l’aigle germanique sous peine de voir disparaître le monument tout entier. La municipalité obtempère. Malgré l’interdiction, des Neversois continuent de commémorer les soldats français tombés pendant la Première Guerre. Un rapport de police datant du 11 novembre 1942 relate des actes de résistance. Une gerbe a été déposée au pied du monument et des tracts appellent à ne pas oublier ceux qui se battent pour la liberté.
A la Libération, de nombreux citoyens souhaitent retrouver leur monument originel. Après quinze ans d’absence, l’aigle se voit restituer une tête. C’est au sculpteur parisien René Collamarini, auteur du monument de la Résistance à Nevers, que l’on confie le soin de réaliser, d’après une photographie, un modèle en plâtre qui est mis en place sur le monument le 16 Février 1955. Le journal du centre relate cet évènement. Le moulage en bronze est remis à la fonderie Sèvre de Nevers (fonderie de canons abritant aujourd’hui l’institut supérieur de l’automobile et des transports). Le 08 mai 1955, les nivernais retrouvent leur monument comme il était avant l’invasion allemande et commémorent les morts des deux guerres.
Magalie Florendeau, professeure d’histoire-géographie.
Contexte
Combattre pendant la première Guerre mondiale : les poilus
Des conditions de vie terribles
Le quotidien du poilu dans sa tranchée est terrible : le froid, l'humidité, la boue, la faim, la soif, les poux, les rats et surtout la peur constante, la mort omniprésente.
Les combats sont atroces, les corps pulvérisés par les gros calibres d’artillerie.
Les pertes engendrées par les armes nouvelles issues de l'industrie sont considérables. À chaque assaut, un homme sur trois est tué ou atrocement mutilé. On dénombre après les trois jours de l'offensive du général Nivelle en 1917 40 000 tués et 90 000 blessés. Et les batailles n'ont jamais été aussi longues : Verdun dure dix mois ! Les soldats, mais aussi les populations civiles, subissent ces violences physiques et psychologiques inouïes.
Mais le conflit familiarise aussi les soldats et les peuples à ce degré de violence et aux morts innombrables. Il provoque des comportements toujours plus brutaux. Des anciens poilus ont expliqué l'effroi premier devant la mort, puis peu à peu une habitude, voire un plaisir difficilement avouable de la donner. Ce consentement à la violence et à la mort subies et données a été nommé par les historiens « l'ensauvagement » ou la « brutalisation ».
Il explique en partie la violence politique de l'Entre-deux-guerres qui s'épanouit dans les mouvements fascistes et nazis.
Complément(s)
Autre(s) ressource(s)
Extrait du conseil municipal décidant de constituer dès l’armistice, un comité composé d’une soixantaine de personnes.
Archives départementales de la Nièvre, délibération du conseil municipal de Nevers, 1D10 n°53.
Esquisse d’un projet de monument présentés par l’entreprise Demay Frère conservés aux archives sont déposés en mairie. On peut voir qu’il prévoyait un caveau dans lequel on pourrait descendre, avec à l’intérieur des plaques portant le nom des morts.
Archives départementales de la Nièvre, Fond Brazeau, 11J66
Inauguration du monument en présence du président de la République Raymond Poincaré.
Archives départementales de la Nièvre, Paris-centre, 1 novembre 1923
Rapport de police du 11 novembre 1942,
Archives départementales de la Nièvre, rapport de police 11 novembre 1942, 137W150
Reconstitution du monument aux morts en 1955, archives départementales de la Nièvre, Journal du centre, 17 février 1955