La colonne Garibaldi à Crépand
Un monument pour commémorer un épisode de la guerre franco-prussienne
Au sommet de la colline de « La Potelle » (381 m d’altitude) la Colonne Garibaldi dresse ses 7 mètres de pierre (dont 3,50 de socle). Préfigurant architecturalement les nombreux monuments aux morts pour la France de la Grande guerreNom donné par ses contemporains à la Première Guerre mondiale. Aujourd’hui les historiens réutilisent ce nom pour marquer la spécificité du conflit de 1914-1918., elle date cependant du conflit précédent. Erigée par souscription en février 1873 en mémoire de la bataille qui s’est déroulée à Crépand deux ans auparavant, la colonne domine le « champ de bataille » et une lecture de paysage permet un voyage dans le temps « en 3 D », d’autant que l’on arrive dans le village par le Moulin Houdot (170 mètres en contrebas) et qu’il faut traverser la commune avant d’emprunter l’escalier à travers la forêt qui y mène.
Au pied de cet imposant monument dont on ne soupçonnerait pas la présence ici, en pleine nature, les tombes de trois francs-tireurs venant de l’Aveyron, des Vosges et de Toulouse, montrent que cette guerre a vraiment rassemblé des hommes de nombreuses régions de France – et même d’ailleurs. Si Giuseppe Garibaldi (1807-1882) est né à Nice sept ans après son rattachement à la France, son fils Ricciotti Garibaldi (1847-1924), qui a mené la bataille, est mort à Rome : l’un comme l’autre sont des patriotes italiens.
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La bataille de Crépand en 1871
En janvier 1871, l’issue malheureuse de la Guerre franco-prussienne ne semble plus guère faire de doute. Mais Giuseppe Garibaldi, qui a rejoint la France dès octobre 1870 (après la chute de Napoléon III et la proclamation de la République en septembre) ne s’avoue pas vaincu et prend la tête de l’Armée des Vosges, composée en grande partie de « corps-francs ».
Le 8 janvier, la brigade menée par son fils Ricciotti va accrocher des unités de la “Sud-Armée” du terrible Général Manteuffel stationnées à Montbard. A 3 km de là, Ricciotti Garibaldi va envoyer ses hommes par trois itinéraires différents sur le village de Crépand, surprenant les Prussiens arrivés par la Colline de la Lâche et positionnés d’abord au Moulin Houdot, puis combattant dans les rues et les jardins du village. Les Prussiens sont lourdement éprouvés par les hommes de Ricciotti lorsque ce dernier aperçoit de nouvelles troupes arrivant par la Forêt de Chaumour. Il est temps de sonner la retraite et de se replier rapidement vers Montigny-Montfort, déguisé en paysans pour les moins rapides d’entre eux.
Daniel Janichon, professeur d’histoire-géographie, référent culture PAH Auxois-Morvan.
Contexte
La guerre que déclare Napoléon III à la Prusse (19 juillet 1870) ne touche tout d’abord pas la Côte d’Or. Certes, l’écho des terribles défaites d’août en Alsace et en Moselle parvient jusqu’à Dijon, ainsi que la capture de l’Empereur à Sedan le 2 septembre 1870. Mais ce n’est que près de deux mois après la proclamation de la République à Paris par Gambetta, (4 septembre 1870) que l’armée va affronter en Côte d’Or ses premiers « Prussiens » - en fait, des Badois, alliés à la Prusse au sein de la Confédération des États Allemands. La 1ère bataille de Dijon (qui laissera son nom à la « place du 30 octobre ») se soldera, après une défense acharnée des Gardes mobiles et des habitants, par l’occupation de la ville (30 octobre 1870 – 27 décembre 1870). Entre-temps, Giuseppe Garibaldi, arrivé en France le 7 octobre s’était vu confier dès le mois suivant par le gouvernement provisoire la mission de reprendre l'initiative en Côte d’Or à la tête de l’Armée des Vosges. Son fils Ricciotti réussit un fameux coup-de-main le 19 novembre 1870 à Châtillon-sur-Seine. Malheureusement Garibaldi échoue à reprendre la capitale de la Bourgogne lors de la 2ème bataille de Dijon du 25 au 27 novembre 1870. De son côté, le Général français Crémer inflige une lourde défaite aux Badois le 3 décembre 1870 à Châteauneuf-en-Auxois. Il remporte également la victoire à Nuits le 18 décembre 1870 et entre dans Dijon en libérateur le 30 décembre 1870. Ces succès français feront dire au Général von Werder : « Ce n'est pas la Côte d'Or, ce pays, c'est la Côte de Fer ». Début janvier 1871, ce sont encore les Francs-tireurs de Ricciotti Garibaldi qui vont harceler les forces de la “Sud-Armée” à Crépand. Ce sont eux que l’on retrouve également les 21-22-23 janvier 1871 (3ème bataille de Dijon) où le chasseur Curtat prend le deuxième et dernier drapeau arraché à l’ennemi durant cette guerre. Malgré cela, un armistice est signé fin janvier 1871, lequel exclut les départements du Jura, du Doubs et…de la Côte d’Or, le tout nouvel « Empire allemand » (18 janvier) se réservant le droit de poursuivre jusqu’au bout Garibaldi et l’Armée de l’Est qui s’y trouvent encore. N’ayant pu délivrer Belfort, les 87000 soldats survivants de cette dernière (les « Bourbaki ») se constituent prisonniers…en Suisse, aux Verrières, le 1er février 1871. Si le traité de paix franco-allemand n’est signé (à Francfort) que le 12 mai 1871, il faudra attendre la veille du 30 octobre 1871 pour voir les troupes d’occupation quitter Dijon…Complément(s)
Site(s)
Dix ans après la guerre de 1870-1871, le souvenir est encore vif dans la population du passage des troupes prussiennes dans les villes et villages de Côte d’Or. Le témoignage que souhaite en laisser un certain Gaudelette, inspecteur de l’enseignement primaire à Dijon n’est pas exempt d’un parti-pris revanchard, confessé dans l’explicit de l’ouvrage : « Nous voulons vous enivrer de haine et de souffrance, Et préparer des vengeurs à la France ! ». Ses 230 pages n’en regorgent pas moins de détails précieux concernant la presque totalité des communes de Côte d’Or qui ont eu à souffrir directement de cette guerre.